A Moscou comme à Kiev, l’orthodoxie est de mise, la tradition est respectée, les cloches des églises sonnent le 6 janvier et les familles se réunissent pour célébrer Noël le 7 janvier. Mais cela c’était hier, avant la guerre. Aujourd’hui on ne parle plus le russe dans les rues de Kiev, mais l’ukrainien.  La guerre des Noël est déclarée. Les églises aux bulbes et dômes dorés de Kiev et Moscou se sont séparées et beaucoup dans la capitale ukrainienne jusqu’aux tranchées de la ligne de front ne veulent plus partager la date de Noël avec l’ennemi russe. La guerre des Noël est déclarée.
L’Ukraine fête désormais Noël le 25 décembre au lieu du 7 janvier, une décision symbolique, un acte de résistance, aussi bien religieux que politique. Cette année, malgré la guerre, la lassitude, les restrictions et le deuil, les Ukrainiens célèbrent Noël, les dimanche 24 et lundi 25 décembre. A Kiev, la veillée de Noël se prépare, un deuxième Noël sans les hommes. Les femmes tiennent la maison, pour que les enfants puissent encore sourire. Une façon de dire que les combats des soldats au front n’est pas vain. Une façon de se montrer plus fort que Poutine et tant pis si du ciel de Kiev tombent le fer et le feu. Sur le front, dans l’enfer des tranchées, sur la ligne zéro, face aux Russes, les soldats ukrainiens usés par deux années de combats, célèbrent avec dignité ce nouvel an. Des conserves envoyées par la famille, un toast et une prière partagés sous le fracas des obus, un moment de paix suspendu avant de reprendre le combat.  Les épouses, les mères de Kiev, les maris, les fils et les frères des tranchées, le savent tous : ils ont gagné la bataille de Noël. Pour la première fois Noël appartient aux Ukrainiens.

Un reportage de 24' de Frédéric Tonolli, images François Cauwell et Frédéric Tonolli, montage Mathias Lavergne. Rédaction en chef, Anthony Dufour. Production, Nicolas Wiart.

Première diffusion le 26 janvier 2024 dans Arte Reportage sur Arte.